Depuis le mois d’Avril, Le M23, ce mouvement constitué d’ex-combattants de la rébellion tutsi congolaise du Congrès national pour la défense du peuple (le CNDP était un groupe armé rebelle à l’époque) déstabilise la province du Nord Kivu à l’Est de la République démocratique du Congo. Dans le cadre d’un accord de paix avec Kinshasa, signé en 2009, le mouvement du M23 avait intégré dans ses rangs des membres des Forces armées congolaises (FARDC). A la suite du même accord, Bosco Ntaganda a été promu général de l’armée au sein des FARDC et le CNDP est devenu un parti politique. Alors qu’ils occupaient des postes décisionnelles dans les rangs des FARDC depuis la signature de ces accords, la majorité de ces militaires ont fait défection à l’armée nationale congolaise en mars 2012. Ces militaires revendiquent entre autre le respect des accords de 2009 qui selon eux ne sont pas respectés par le gouvernement congolais. D’autres pensent que le respect de ces accords n’est pas le seul motif de ces défections mais qu’il y a une volonté de diviser le pays. Le M23 continue de provoquer d’énormes pertes en vies humaines et des déplacements massifs de la population.
Les revendications du M23 :
Ainsi le porte parole du M23, le lieutenant-colonel Vianney Kazarama indique :
Nous demandons au gouvernement de la République Démocratique du Congo de fournir des efforts pour l’éradication des forces négatives à l’Est, notamment les FDLR (Forces démocratiques de libération du Rwanda, une rébellion constituée d’hutu rwandais, ndlr) Nous demandons le retour de tous les Congolais réfugiés, vivant à l’extérieur du pays, en exil ; la reconnaissance des grades formels de tous les officiers des groupes armés et ceux du CNDP en particulier, l’intégration politique des membres du CNDP au sein du gouvernement central»
Des conséquences importantes sur la population civile
Le début de cette rébellion a déclenché une nouvelle guerre au Nord Kivu qui a occasionné des pertes en vies humaines et un déplacement massif de la population.
Au cours des dernières semaines, le M23 est passé de 1 000 à 2 000 combattants et ont pris le contrôle de plusieurs localités dans la province du Nord Kivu. Ce regain de violence a fait plus de 200 000 déplacés et plus de 30 000 réfugiés au Rwanda et en Ouganda.
Le rôle controversé du Rwanda
Quelques experts de la région pensent que le gouvernement rwandais serait impliqué dans le soutien du M23 qui déstabilise la province du Nord Kivu.
Différents rapports des Nations Unies et de l’organisation « Human Right Watch » dénoncent la participation indirecte du Rwanda à ce conflit. Le Rwanda aurait soutenu en armement le M23 et aurait envoyé des troupes Rwandaises combattre auprès des rebelles.
Une annexe du rapport annuel du Comité des sanctions de l’ONU sur la RDC, rendu public au début du mois de juillet, indique que les forces armées rwandaises:
« fournissent du matériel militaire, des armes, des munitions et des fournitures diverses aux rebelles du M23 » et octroient soutien et protection au général rebelle Bosco Ntaganda, recherché par la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes de guerre.
Les accusations du groupe d’experts des Nations unies reposent sur les témoignages anonymes de quatre-vingts mutins déserteurs dont trente et un Rwandais du M23.
Les experts des Nations unies disposeraient de preuves selon lesquelles plusieurs hauts gradés rwandais, dont James Kabarebe -le ministre de la Défense, sont en contact permanent avec le M23 :
Aujourd’hui les Nations-Unies disposent de preuves que la guerre à l’Est de la RDC est traitée au Rwanda comme une affaire d’Etat, puisque ce sont les hauts dignitaires du régime de Kigali qui se chargent de ce dossier.
Controverse sur les mutins déserteurs
Le 24 Juillet dernier à la frontière à Goma, dans l’est de la République démocratique du Congo, le Rwanda a refusé de récupérer 24 mutins du M23, présumés Rwandais, qui devaient lui être remis par l’ONU où les mutins s’étaient rendus après avoir déserté le groupe rebelle:
Les 24 mutins s’étaient rendus en mai à la Mission de l’ONU en RDC (Monusco) après avoir quitté les rangs du M23 dans la province du Nord-Kivu. Ils avaient déclaré à la Monusco être des citoyens rwandais, qu’ils avaient été recrutés au Rwanda avant d’être envoyés en RDC pour rejoindre le M23. La Monusco les a ramenés samedi à la frontière pour les remettre aux autorités rwandaises, mais celles-ci ont refusé de les récupérer en expliquant qu’elles “ne pouvaient pas prendre des gens du M23″, a déclaré à l’AFP un porte-parole de la Monusco à Goma.
Pendant que les Nations Unies ainsi que Human Right Watch disposent des preuves démontrant l’implication du Rwanda dans la déstabilisation de la RDC, le Gouvernement congolais par son ministre de l’information confirme ces allégations:
C’est avec colère que le ministre des médias, relations avec le parlement, initiation à la nouvelle citoyenneté et porte-parole du gouvernement, Lambert Mende Omalanga s’est adressé aux journalistes à Goma samedi 09 juin. Au cours d’un point presse, Lambert Mende a communiqué le rapport du gouvernement concernant la situation sécuritaire au Kivu. Il n’a pas mâché les mots au sujet des relations entre Kinshasa et Kigali : ” Une chose est indéniable : le territoire rwandais a servi à la préparation d’une conspiration qui, après avoir commencé comme une simple mutinerie, évolue dangereusement vers un schéma de rupture de la paix entre deux pays de la région des Grands Lacs.
Malgré les multiples preuves qui démontrent l’implication du Rwanda dans le soutien à ces rebelles, le Rwanda continue à nier toutes les affirmations qu’ils considèrent comme étant sans fondement.
Au cours d’une conférence de presse tenue mardi 19 juin à Kigali, le président du Rwanda, Paul Kagame, avait affirmé que:
«le Rwanda n’est pas la cause des problèmes du Congo (…) », indiquant que les problèmes congolais doivent être réglé par les congolais eux même.
Pendant ce temps, la situation dans la province du Nord Kivu reste très tendue car Le nombre des déplacés ne cesse d’accroitre. Les jeunes de Goma déplorent le soutien du Rwanda aux mutins du M23. Pour manifester leur colère, les jeunes de Goma ont demandé des armes pour combattre les rebelles:
La journée du lundi 9 juillet 2012 a été caractérisée par des actes d’une barbarie sans nom. En effet, les jeunes de la ville de Goma, essentiellement les conducteurs des taxis motos communément appelés motards dans cette ville, ont manifesté dans les villes de la région. Certains ont pris le contrôle des ronds-points de la ville (Signers, TMK et Birere, Corniche) ; d’autres ont occupé une partie de la frontière entre le Rwanda et la RDC; d’autres enfin se sont dirigés vers les centres du pouvoir (Gouvernorat et Région militaire).
Ces jeunes se sont senti vexés par les revers que subissent les militaires FARDC au front mais aussi par le fait que plusieurs localités étaient déjà entre les mains des M23.