Fondamentalistes, néonazis et policiers main dans la main : vers une nouvelle dictature en Grèce ?
Sommes nous de retour en dictature ? Beaucoup se posent la question. Un sentiment d’occupation est général en Grèce, il suffit de voir l’accueil réservé à Angela Merkel mardi dernier. La Grèce sous une dictature économique, c’est un fait. Mais plus grave, ce sentiment d’occupation fait les beaux jours du l’ultra nationalisme qui propulse les néonazis de l’Aube Dorée dans les sondages. Le dernier acte : l’occupation du théâtre qui joue en ce moment Corpus Christi. Un réel danger pour la démocratie grecque.
Inquiets pour leur sécurité, certains acteurs de Corpus Christi avaient décidé de quitter la troupe il y a quelques semaines devant la pression de l’Eglise et des néonazis de l’Aube Dorée. De nouveaux acteurs les ont remplacé au pied levé, mais il semble que l’avenir de cette pièce n’est pas complètement assuré. Un des acteur est rentré chez lui les jambes en compote devant une peur bien compréhensible.
Hier soir, un journaliste a été tabassé devant de théâtre pris d’assaut par des fondamentalistes religieux et des néonazis de l’Aube Dorée. La police sur place n’a pas bronché et s’est même amusée de la situation. Le journaliste a commenté sur twitter ce qui lui est arrivé. Traduction :
« Devant l’entrée de la salle, il y avait des prêtres et des membres de l’Aube Dorée qui déchiraient les affiches du spectacle et les piétinaient. J’ai sorti mon téléphone portable pour prendre des photos pour le blog. 5 membre de l’Aube Dorée et un policier m’ont encerclé.
Ils m’ont tiré sur le côté, m’ont insulté, m’ont tiré la barbe, craché au visage, et m’ont frappé à l’estomac.
Ils m’ont demandé : « Êtes-vous un journaliste? » J’ai répondu « J’écris pour lifo », dans l’espoir d’échapper à un passage à tabac. Le contraire est arrivé.
Il y avait des flics à proximité. Je leur ai crié « Ils me battent, faites quelque chose ! » Réponse: « Je n’ai rien, déplacez vous sur le côté s’il vous plait » Le flic portait 3 étoiles.
Ils ont jeté une cigarette allumée dans ma poche. Une femme debout près de moi m’a avertit, juste en face du flic. Il a fait comme s’il n’avait pas entendu.
J’ai commencé à avoir peur et je me suis éloigné de l’entrée. Ils m’ont crié « Va-t’en, sale pédé, va sucer la bite de quelqu’un d’autre ! »
Je me suis retourné pour observer. Un député connu de l’Aube Dorée me suivait. Il m’a frappé deux fois au visage et m’a fait tomber.
Par terre, je perds mes lunettes. Le député de l’Aube Dorée me donne des coups de pieds. Des policiers sont exactement à deux pas de là. Ils ont le dos tourné.
A plusieurs reprises, j’ai crié aux flic « ils me tabassent, faites quelque chose ! » Ils restent le dos tourné et s’éloignent.
Le reste de leur groupe me crie juste à côté de l’officier de police « Pleure, petite chatte, reine, petite fille ».
Nous passons devant des dizaines de flics qui traînaient en repartant. Je leur dis que j’ai été battu à l’entrée du théâtre. Ils m’ignorent. Un d’eux me souffle un baiser sarcastique. »
Le journaliste a décidé de ne pas porter plainte pour ne pas que la police ait ses informations personnelles. Informations qui pourraient retomber dans les mains de l’Aube Dorée…
Voilà la Grèce d’aujourd’hui sous les effets de l’austérité. Une poussée forte de l’ultra nationalisme couplé d’une impunité aidée par une police coupable de fermer les yeux. Et ce cas n’est pas un cas isolé.
Voilà ce que l’on pouvait voir hier devant le théâtre :
Selon le site internet de l’Aube Dorée, 4 députés du parti/groupuscule néonazi étaient devant le théâtre au moment où le journaliste bloggeur s’est fait tabassé : Panagiotaros, Pappas, Kouzilos et Michos.
Après cette agressions, les employés du théâtre craignaient qu’il y ait encore des voyous qui se cachent dans les rues secondaires. La peur était là. Bien présente. Et justifiée.
6 bus de la police anti-émeute sont arrivés pour calmer la situation mais le directeur du théâtre a indiqué avoir peur de sortir du bâtiment car les manifestants et les néonazis étaient encore présents. Des pierres ont été jetées. Il a indiqué que c’était inacceptable de devoir avoir besoin de la protection policière pour pouvoir jouer une pièce.
Il a indiqué :
« La dernière fois qu’une pièce de théâtre était jouée sous la garde de la police, c’était pendant la junte. Je ne veux pas croire que c’est de nouveau la junte »
Pourtant, les derniers évènements laissent un doute. Des manifestants antifascistes arrêtés le 30 septembre lors d’affrontements avec des néonazis auraient été torturés par la police. Le Guardian en a d’ailleurs fait un article récemment, repris par une partie de la presse française (dont Actualutte).
De nombreux évènements montrent que le groupuscule néonazi a des appuis forts dans la police. Plusieurs cas de citoyens ayant appelé la police pour des problèmes de voisinage se sont entendus dire : « Si c’est à cause des immigrés, appelez l’Aube Dorée ».
La dernière manifestation du 9 octobre a toutes les raisons d’inquiéter la démocratie grecque. Le gouvernement a utilisé une loi datant de la junte pour interdire une partie d’Athènes aux manifestants. Cette loi n’avait pas été utilisée depuis 1974.
Toujours lors de cette manifestation, un CRS (MAT N° 1236) a utilisée une femme, terrorisée, comme un bouclier humain :
Plusieurs photos montrent le CRS utiliser cette femme pendant la manifestation. Une est particulièrement choquante, puisque l’on peut voir une inscription « Killer » sur la bandoulière du CRS :
Cela fait maintenant 37 jours que des députés néonazis de l’Aube Dorée ont tabassé des vendeurs étrangers sur les marchés de Rafina et Missolonghi. Ces évènements ont été enregistrés sur des vidéos. Mais il ne se passe rien.
Un quatrième sondage place le groupuscule néonazi en 3ème position, devant le PASOK. Et il ne se passe rien.
Un ami chômeur en formation informatique dans un bureau pour l’emploi m’a dit dernièrement :
« Il y a un bureau de l’Aube Dorée à côté du bureau pour l’emploi. Nous sommes 20 dans la formation. 18 sont pour l’Aube Dorée » .
Et il ne se passe rien.
Ah si, l’Union Européenne vient de recevoir le prix nobel de la paix.