Accueil ACTUALITE 3 bonnes raisons d’être solidaires pour les retraites !

3 bonnes raisons d’être solidaires pour les retraites !

En ce début 2023, il serait tentant et quasi « naturel » de médire le mouvement des grèves qui se préparent… du moins si l’on écoute ce qui se dit sur les plateaux télés/radios ainsi qu’un bon nombre de chaînes et vidéos internet dites « d’opinion ».

En effet, on incline à nous faire adhérer à cette réforme partant qu’elle serait pour résumer :
1- « inévitable » car elle comblerait un déficit à venir, lui aussi « indéniable » à l’horizon 2030
2- « indiscutable » car l’allongement d’âge de départ serait la « seule » option selon la macronie
3- « juste » car elle répartirait l’effort tout en tenant compte de la fameuse « pénibilité »

Bref, 3 bonnes raisons au moins de ne pas sortir les jours de manifestation et d’aller travailler les jours de grève en se plaignant des syndicats « frondeurs » et des grévistes « paresseux », à grand renfort de micro-trottoir d’usagers des transports mécontents, de sondages-bidon médiatisés et d’éditorialistes graves fustigeant cette France « ingrate » qui « renâcle » au boulot, vous savez, les « gaulois réfractaires » ?

Sauf qu’il n’en est rien. Ces 3 raisons résumées plus haut et largement distillée à droite par des politiques (y compris d’anciens soit-disant « socialistes » tels Dussopt ou Borne) et nombre de médias télévisuels, radios ou internets … sont clairement de purs mensonges d’une propagande éhontée pour tenter de justifier l’injustifiable et accepter l’inacceptable.

Mais démontrons le tout, point par point (borne par borne) ?

1- Inévitabilité en carton

Organisme reconnu comme indépendant, le C.O.R. fournit chaque année des rapports quant à l’état du système de retraite mis en place par la gauche suite au C.N.R. au lendemain de la seconde guerre. On y découvre que le système est excédentaire, soit en pleine santé.
On y apprend notamment qu’on a l’un des plus bas taux de retraités pauvres même en se comparant aux autres pays européens où l’âge de départ est souvent plus tardif.
On peut aussi y découvrir qu’en éloignant la gestion des pensions de retraite des appétits privatifs dits « par capitalisation », que le gouvernement vantait il y a peu mais écarte maintenant, on a gagné largement en stabilité dans la durée.

Un autre élément non-négligeable : le C.O.R. conclut d’aucune nécessité de réformer, il mesure depuis plusieurs décennies une part stable du P.I.B. français accordée aux retraites. En d’autres termes, cela signifie que le régime tient bon malgré diverses crises mondiales notamment celle de 2008.
Enfin, dans ses projections il dessine plusieurs hypothèses pour 2030, dont une seule évoque préventivement un possible futur déficit non-confirmé à ce jour, afin de réfléchir à des solutions de prévoyance dans ce cas imaginaire. C’est là dessus que le gouvernement table pour nous faire avaler la pilule amère de sa fausse médecine libérale.

Il n’y a donc aucune inévitabilité ni justification à la réforme, à part de rendre le système moins attractif afin, à terme, de tenter les plus aisés à opter pour la capitalisation. En effet, le secteur privé de la finance assurentielle lorgne depuis longtemps sur l’argent qui dort dans les caisses des retraites françaises !
On se souviendra, pour illustrer, du scandale d’une réforme Sarkozy faisant le bonheur du groupe Malakoff-Médéric à la manoeuvre… et qui employait alors Guillaume, le frère de l’ex (p)résident de la république. Avec Macron, rien n’a changé ou presque, à part le marketing aux allures faussement modernes, mais avec un fond toujours aussi rétrograde pour détruire nos acquis sociaux.
Au passage, le gouvernement semble chercher à faire des économies sur le dos des futur.e.s retraité.e.s afin de pouvoir déplacer ses pions budgétaires ailleurs (armement en tête).

Bref, le storytelling actuel n’est qu’un prétexte pour nous faire les poches sans qu’on riposte !

2- Indiscutabilité sélective

Mais creusons plus loin : si un futur déficit, pour l’heure hypothétique, s’avérait confirmé à l’avenir, il y aurait dès lors bien d’autres moyens efficaces de le combler :

Le plus évident serait de faire contribuer les régimes de retraite des plus aisés qui, en proportion de cotisation, profitent plus largement et longtemps du système. Ou même de créer de nouvelles taxes sur les revenus et la spéculation des plus riches, qui ont largement continué à s’enrichir même durant la crise du covid. On pourrait aussi forcer les employeurs à rémunérer les femmes à égalité des hommes, cotisant ainsi davantage ce qui renforcerait encore le modèle.

Mais sur tous ces points, le gouvernement se refuse à considérer une quelconque option. Pire, il fixe un tabou absolu sur le montant des cotisations, dont quelques points annuels supplémentaires suffiraient pourtant à balayer l’imaginaire « problème » qu’il crée. Il se veut donc seul pourvoyeur du poison et du « remède » !

Il parie ouvertement sur notre silencieuse acceptation et notre manque de prévoyance : sacrifice de notre temps de vie futur contre illusion d’un pouvoir d’achat immédiat maintenu (ce qui vu l’inflation est faux, à salaire constant). Il compte aussi sur l’égoïsme des retraités actuels par rapport à leur descendance qui sera seule impactée par l’inégale réforme.

3- Justice nulle part

Vu que l’espérance de vie en bonne santé est nettement plus basse chez les classes populaires et métiers dits « manuels » par rapport aux classes moyennes / aisées aux métiers plus « intellectuels », demander à tout le monde 2 ans de plus c’est faire peser les plus gros efforts sur ceux qui vivent déjà moins longtemps. C’est donc le contraire de la justice !

Autre point d’inégalitarisme : les femmes qui, en raison de leur carrière plus hachée et niveau de revenu et donc de cotisation plus bas que les hommes, doivent déjà cotiser plus longtemps avec le système actuel. Le nouveau système leur demanderait des mois voire des années de cotisation supplémentaires bien au-delà de 64 ans. C’est ici également injuste.

Enfin, on le sait, le bas taux d’emploi des seniors (hommes comme femmes) est déjà un point noir de l’économie actuelle dont Macron candidat en 2017 s’émouvait publiquement tout en promettant qu’il n’aurait jamais l’hypocrisie (pour le citer)… de faire ce que le Macron de 2023, donc un hypocrite selon lui-même, va tenter de faire. Il y a là une autre injustice nette.

On pourrait arguer que des critères de pénibilité et une retraite plancher à 1200€ (bruts), refusés hier par Macron dans sa première mouture avortée de 2019, ont été saupoudrés cette fois comme pour rendre le gâteau moins indigeste. Malheureusement ces critères sont encore trop parcellaires et les critères de son plancher de paille ne concernent qu’une infime poignée des personnes qui auraient la nécessité vitale de partir tôt avec de quoi vivre.

Derrière les apparences trompeuses et la communication rodée, l’injustice de classe serait donc le fondement même de cette réforme, sinon sa raison d’être ?

4- En guise de conclusion

Il faut dès maintenant former un front uni face à cette réforme malsaine qui mérite de retourner à la poubelle de l’histoire politicienne française.
Pour une fois, les syndicats donnent l’exemple CFDT incluse qui n’est pourtant une foudre de guerre habituellement, et qui semble ici inflexible sur son refus du report de l’âge.

Les partis politiques, notamment ceux de la NUPES, semblent avoir compris leur rôle de renfort de la contestation et l’appuient sans chercher à en prendre le leadership.
Une motion référendaire a même été déposée sur la réforme pour obliger Macron à se prononcer, a priori contre, et démontrer par là même son anti-démocratisme patent.

Même si l’opinion publique est plutôt en faveur de l’opposition, la difficulté est à venir, notamment durant les actions prochaines durant lesquelles il faudra rester unis.
Le gouvernement devrait probablement cyniquement jouer l’usure en comptant sur le coût financier des grèves, le mécontentement des blocages, les médias aux ordres (dont la plupart sont possédés par des millionnaires/millardaires très à droite), la friabilité des syndicats et des branches, la résignation ambiante et bien sûr le contexte international.

Soyons solidaires et restons-le, en espérant tenir jusqu’à l’abandon souhaitable du projet !

Quelques sources :
Rapports du C.O.R. https://www.cor-retraites.fr/documents/rapports-du-cor
Alternatives écartées https://www.huffingtonpost.fr/economie/article/reforme-des-retraites-les-alternatives-ecartees-par-le-gouvernement_212903.html
Réforme injuste https://www.oxfamfrance.org/inegalites-et-justice-fiscale/reforme-retraites-injuste/
Front syndical https://www.publicsenat.fr/article/politique/reforme-des-retraites-le-front-syndical-une-menace-pour-le-gouvernement-231739

Et pour aller encore plus loin :
Calculateur comparatif https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2023/01/18/retraites-notre-calculatrice-pour-simuler-votre-age-de-depart-avant-et-apres-la-reforme_6158342_4355770.html
Les non-dits https://www.lepoint.fr/invites-du-point/retraites-les-non-dits-de-la-reforme-15-01-2023-2504868_420.php
Documentaire arte https://www.arte.tv/fr/videos/100291-003-A/arte-regards-retraite-a-40-ans/
Vidéo Dailymotion https://www.dailymotion.com/video/x8hk6hd
Gagnants et perdants https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2023/01/16/reforme-des-retraites-les-gagnants-et-les-perdants-en-neuf-cas-pratiques_6157997_4355770.html
Risques politiques https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/01/14/retraites-le-risque-politique-d-une-reforme-desequilibree_6157861_823448.html

Illustration : Info’com-CGT