Sommes-nous prêts pour la démocratie directe ?
La démocratie directe, renforcée par les moyens électroniques actuels, permettrait théoriquement d’obtenir une expression immédiate de tout le peuple sans aucun intermédiaire risquant de biaiser la représentativité du système politique. Mais tout ce courant de pensée repose notamment sur le présupposé trompeur que chacun.e est apte à co-décider à égalité avec ses pair.e.s sur toutes les grandes questions.
Or, de nombreuses études sociologiques (dont celle de P. Bourdieu dans « La Distinction ») démontrent une inégalité autant dans la compétence politique que dans l’assurance à l’exprimer. Ceci induit que de nombreux pans de la société se retrouvent en totale incapacité de reconnaître et donc de favoriser les décisions allant dans leur intérêt parmi toutes celles possibles.
Pire encore, les conditions de production des réponses ainsi que la manière dont les questions sont posées peuvent encore aggraver la qualité du résultat obtenu, par exemple lors d’un référendum ou d’un sondage. Ainsi, les personnes en sont réduites à adopter des principes idéologiques généraux, ou bien leur propre intuition éthique, sinon à se laisser diriger par une autorité externe (parti, personnalité, etc) ou par quelque biais cognitif.
Dès lors, nous devrions oeuvrer à ce que notre système politique évite enfin ces principaux écueils, rééquilibre les capacités de réflexion et de prise de parole, améliore rééllement l’autonomie de chacun.e sur les questions publiques. Ceci passe non pas par une individualisation qui ne ferait qu’empirer ces inégalités, mais par une meilleure délibération collective au sein des instances (syndicat, association, etc) permettant de se politiser.