La république « irréprochable » de Sarkozy
Lors de son discours d’investiture à l’élection présidentielle du 14 janvier 2007, nicolas sarkozy nous promettait une ère de transparence politique, de justice et d’égalité. Voici d’ailleurs une partie de son crédo, base d’une politique en rupture avec la tradition d’une « république monarchique » qui s’est développée au fil de la Vème république :
[wp-jw-player src="http://actualutte.com/documents/republique_irreprochable.flv"]» La démocratie irréprochable ce n’est pas une démocratie où les nominations se décident en fonction des connivences et des amitiés mais en fonction des compétences. (…) Je ne transigerai pas. Pour certains postes il ne doit pas y avoir de nomination sans qu’au préalable celui que l’on envisage de nommer ne soit contraint d’exposer ses vues stratégiques pour l’entreprise ou l’organisme qu’il veut présider. (…) Le fait du prince n’est pas compatible avec la République irréprochable. (…) »
Voici donc, par le menu, quelques exemples récents de cette « démocratie irréprochable » et les « nominations irréprochables » qui viennent illustrer ces promesses martelées avec grande conviction.
Brice Hortefeux : l’encombrant chômeur à rémunérer
Sorti du gouvernement suite à l’odeur de soufre qui l’entourait (relatif aux procès pour propos racistes et atteinte à la présomption d’innocence), B.H. devrait attendre l’automne prochain pour revenir officiellement aux affaires à l’Élysée en tant que conseiller de campagne de nicolas sarkozy. Le malheur pour lui, c’est qu’il n’est rémunéré que sur son mandat de conseiller régional d’Auvergne et sur la commission des investitures de l’UMP (qu’il co-préside avec Jean-Claude Gaudin). De plus, il ne bénéficie plus d’aucune immunité parlementaire.
Il aimerait donc retrouver son siège au parlement Européen, qu’il avait cédé à Catherine Soullie. Il ne voulait pas quitter le gouvernement, regrettant à l’époque d’avoir été trop haut dans la liste, et donc d’avoir eu ce siège au parlement Européen. Ce poste représenterait une rémunération mensuelle de 7.956,87 euros et une enveloppe mensuelle pour rémunérer les assistants de 21 209 euros. Mais, pour pouvoir siéger au parlement, il faut absolument remplir deux conditions :
- Avoir siégé à la première séance de la législature, la séance appelée « constructive » du 14 juillet 2009.
- Avoir rempli sa déclaration d’intérêts qui seule peut valider un mandat de député Européen..
Comme aucune de ces deux conditions n’est remplie, B.H. n’est pas considéré comme un élu de la législature en cours, et n’a donc pas le droit d’y siéger ni d’y avoir un poste de député.
Mais dans la « république irréprochable » de sarkozy, et ses « nominations sur projet exposé » par le futur intronisé, il existe des façons de contourner la loi. Voyons plutôt.
Si Mme Soullie démissionne, le siège vacant sera confié au suivant de liste. Il peut être proposé aux cinq suivants sur la liste. Mais, si aucun des cinq suivants n’accepte le siège, alors les autorités françaises (ministère des affaires européennes, en l’occurrence Laurent Wauquiez), pourront nommer qui bon leur semble. Il faudra juste décourager les cinq suivant sur la liste pour installer Hortefeux sur le siège et lui faire retrouver une immunité parlementaire bienvenue pour les deux futurs procès … malgré le problème juridique et éthique que cela pose.
Gérard Longuet : La fonction crée les avantages
Outre le fait que dans une « république irréprochable » faire appel à un élu qui supporte déjà une plainte pour prise illégale d’intérêts, recel, blanchiment, escroquerie, abus de confiance et abus de biens sociaux (de la part d’un actionnaire de GD Suez) et d’une autre en rapport à l’affaire de Karachi et les rétro-commissions et un versement d’un montant de 5 millions de francs (pour l’achat du siège du Parti républicain dont il était le président), est déjà gravissime, on apprend à présent que celui-ci trempe aussi dans une affaire de vente de timbres version « de luxe », offerts aux hauts fonctionnaires par la Poste lors de la sortie de nouveaux timbres .
Dans son patrimoine, on remarquait une maison dans le Sud de la France (Saint Tropez), qui ne pouvait avoir été financée par l’intéressé, en regard de ses revenus à l’époque. Martin Hirsch a donc expliqué dans son livre sur les conflits d’intérêts, qu’un proche de Longuet révèle qu’il a pu financer une grande partie de cette acquisition par la vente de ces fameux timbres. D’ailleurs, il concède les avoir reçus pendant son mandat.
A l’époque, en 1994, il était ministre des Télécommunications sous Balladur…
Et pour finir, cerise sur le gâteau, une remarque qui fleure bon le racisme et la pure et hypocrisie ; parlant de la nomination de Malek Bouthi à la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde), M Longuet déclarait :
Malek Boutih est un homme de grande qualité mais ce n’est pas le bon personnage parce que la Halde, cela veut dire que c’est la France qui s’ouvre aux populations nouvelles.
Schweitzer, c’est parfait ! Un vieux protestant, parfait ! La vieille bourgeoisie protestante, parfait ! […] parce que il vaut mieux que ce soit le corps français traditionnel qui se sente responsable de l’accueil de tous nos compatriotes.
Estrosi : Pourquoi se priver, je ne paye pas ! !
Le cas Estrosi est aussi très représentatif de la politique irréprochable de sarkozy.
Déjà, il se retrouve en mai 2010, alors qu’il est ministre de l’industrie, avec deux logements de fonction. En effet, le premier se trouve au ministère des Finances et le second, en plein Paris, un 70 m² dans le chic VIIème, rue de Lille. Logement qui va surtout bénéficier à sa fille, étudiante, qui va l’occuper aux frais de la Princesse.
Pour des raisons d’horaires et de calendrier, en février 2008, il va facturer 138000 € pour un aller-retour Paris-New York (il avait même exigé d’être débarqué à Nice), juste pour pouvoir assister à une sauterie à l’Elysée entre sarkozystes de la première heure. Ce sera une location d’un jet privé, un Falcon 900 de chez Dassault. Il avait déjà été épinglé pour une même histoire lors d’un déplacement dans les DOM, après avoir loupé un vol régulier Air France.
Dernièrement, le Canard dans son édition du 9 mars, raconte encore un débordement de luxe du bonhomme. Ayant perdu ses prérogatives de ministre, voiture de fonction en tête, Estrosi a donc trouvé un système lui permettant quand même de garder ses « privilèges monarcho-républicains » d’élu du peuple :
Bénéficiant à Nice, en tant que député-maire, d’une Citröen C6 pour ses déplacements locaux, il a préféré la faire monter à Paris pour ses déplacements parisiens. Un chauffeur de sa mairie de Nice vient à Paris pour qu’il le véhicule les jours de session parlementaire. Ensuite, le chauffeur rentre à Nice et gare la C6 sur le parking de l’aéroport d’Orly quand il reprend l’avion. Ce chauffeur vient donc en avion le mardi en fin de matinée et repart pour Nice le mercredi en fin de soirée.
Coût hebdomadaire de l’histoire, 500 euros de billets d’avion plus les repas du chauffeur et environs 70 euros pour la nuit d’hôtel. Du coup, la mairie de Nice a du racheter un autre véhicule de fonction pour ses déplacements dans la région niçoise (Citroën C5 V6 Exclusive). D’autre part, Estrosi bénéficie d’un logement de fonction à Nice, dans le palais des rois de Sardaigne.
Les exemples sont encore légions, mais nous y reviendrons certainement plus tard …