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Egypte: rejoins notre résistance à la contre-révolution!

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Crédit photo Ahmad Hammoud – licence CC 2.0
 
Nos camarades du Caire appellent à un boycott des prochaines élections présidentielles et à une reprise du processus révolutionnaire pour la démocratie réelle.
 
Pour vous, à côté de qui nous luttons,
 
Depuis le début de la révolution égyptienne, les pouvoirs en place ont lancé une contre-révolution vicieuse pour contenir et enfermer notre lutte en noyant la voix du peuple dans un processus de réformes politiques au coup par coup  et sans aucune signification. Ce processus a pour but de dévier le chemin de la révolution et les demandes du peuple égyptien pour «le pain, la liberté et la justice sociale. »
 
Seulement 18 jours après le début de notre révolution, et depuis que nous avons éjecté Moubarak du pouvoir, le discours de la classe politique et de l’infrastructure des élites, y compris l’État et les médias privés, continue de privilégier les discussions des ministres successifs, les remaniements ministériels, les référendums, les comités , les constitutions et le plus flagrant, les élections parlementaires et maintenant présidentielles.  
 
Notre choix dès le début a été de rejeter la totalité des tentatives du régime pour faire glisser la révolution populaire vers un dialogue grotesque avec la contre-révolution, enveloppées dans le discours d’un «processus démocratique», qui ne promeut ni les exigences de la révolution, ni représente toute substantielle et véritable démocratie. Ainsi, notre révolution continue, et doit se poursuivre.
 
Les égyptiens se retrouvent maintenant à un moment vulnérable. Le discours politique officiel serait de faire croire au monde que les bases de la démocratie reposent actuellement sur un choix entre  « deux maux ».
 
Ce sont:
  • Ahmed Shafiq, qui garantit la consolidation du régime sortant et son retour avec une vengeance, promettant ouvertement une agression criminelle sur la révolution dans les spectres fascistes de la «sécurité» et la «stabilité», et la fausse promesse de protection pour les minorités religieuses (contre lesquelles le régime met en scène systématiquement les agressions et l’isolement, dans le cadre de ses campagnes de peur);
 
  • Mohamed Morsi, le candidat des Frères musulmans, dont nous sommes censés imaginer qu’il pourrait nous «sauver» de l’«ancien régime» à travers les mythes de la renaissance culturelle – tout en consolidant son fief financièr et l’hégémonie régionale capitaliste qui favorise l’exploitation effrénée de la population de l’Egypte et de ses ressources.
 
Cette consolidation, nous en sommes certains, sera accompagnée par un tri ultérieur de l’appareil militaire pour protéger la classe dirigeante enhardie de la Fraternité musulmane, de la colère et de la révolte de ses victimes : les dirigeants de l’organisation ont toujours combattu le peuple en condamnant et interdisant ses luttes pour la subsistance, la dignité et l’égalité.
 
Selon les responsables électoraux, la plupart des électeurs eux-mêmes (75 %) ont choisi ni Shafiq, ni Morsi au premier tour des élections. Nous refusons de reconnaître le choix du «moindre des deux maux » lorsque ces maux représentent tout deux le même régime. Nous croyons qu’il y a un autre choix. Et à une époque où le sens commun est perçu comme aussi loin de la vérité que cela peut être, nous trouvons nécessaire de reprendre la parole une fois de plus.
 
Nous percevons l’élection présidentielle en Egypte comme une tentative par la junte militaire encore en vigueur et de ses forces contre-révolutionnaires, de recueillir une légitimité internationale en cimentant le régime existant et en portant des coups plus meurtriers à la révolution égyptienne. Nous vous demandons de vous joindre à nous pour résister à la logique de ce processus qui vise à enclaver davantage la contre-révolution.
 
Notre lutte n’existe pas dans l’isolement, mais dans le partage de la vôtre.
 
Qu’est-ce que la révolution, sinon le rejet immédiat et sans compromis du statu quo : de la puissance militarisée, de l’exploitation, de la stratification en classes, et de la violence policière sans relâche – pour n’en nommer que quelques-unes des caractéristiques les plus fondamentales et cancéreuses présentes dans la société actuelle. Ces réalités structurelles ne sont pas uniques à l’Egypte ou à la révolution égyptienne.
 
Dans les deux régions du Sud et du Nord, les communautés résistent à ce que nous sommes censés accepter sans remise en cause, se levant contre la perspective réaliste et étroite qui nous dit que la démocratie est simplement de choisir le moindre des «deux maux», et que l’élection de l’un ou l’autre représente un choix au sein du gouvernement plutôt que ce qu’elle est : une affirmation du gouvernement que ce qui existe – que des débridées, répressives et déshumanisantes relations capitalistes.
 
Nous sommes solidaires avec les populations précaires et menacées d’extinction qui ont choisi de se défendre contre un système mondial agressif et qui est en crise ; en effet, un système de destruction des peuples qui, dans ses heures crépusculaires, atteint des niveaux sans précédents de surveillance, militarisation et violence pour réprimer nos insurrections.
 
Nous devons faire comprendre que, malgré le fait de la  louange politique internationale sur la nature «démocratique» du premier tour des élections présidentielles égyptiennes, nous rejetons fortement et  catégoriquement le résultat de ces élections, car il ne représente pas les désirs du peuple égyptien qui a combattu par sa révolution du 25 Janvier.
 
En outre, nous rejetons catégoriquement les élections elles-mêmes, sur le principe, pour les raisons suivantes :
 
Même selon les normes des systèmes disparus et archaïquess de la représentativité qui existaient autrefois dans les pays du Nord, aucune « élection libre et équitable » ne peut avoir lieu sous la supervision d’une junte militaire avide de pouvoir, en lice sans relâche pour la domination politique continue et la protection de son empire économique vaste, avec tant d’acharnement, en effet, qu’aucune constitution n’existe pour définir les pouvoirs de toute présidence. Comment pouvons-nous tolérer la supervision d’une dictature militaire dans tout processus politique, lorsque des milliers d’Egyptiens continuent de croupir dans les cachots de la prison militaire après avoir subi des arrestations arbitraires, campagnes de torture systématique, et les tribunaux militaires d’exception?
 
Il existe un abus de droit en faveur de la puissance de marchandage des généraux au pouvoir militaire : afin de légitimer le candidat préféré de la junte, l’ancien Premier ministre Ahmed Shafiq, la Cour suprême de la Commission présidentielle des élections a tout simplement et ouvertement ignoré la loi de l’exclusion politique récemment adoptée afin d’interdire la candidature de tous les membres du régime de Moubarak de se présenter aux élections présidentielles.
 
L’absurdité d’un pouvoir illimité concentré dans les mains d’une commission électorale composée de figures centrales de l’ère Moubarak, a pour but de manipuler un processus «démocratique» .
 
La vague de programmes défendus par les candidats les plus fortement soutenus financièrement vont à l’encontre des valeurs et des objets de la révolution, la raison pour laquelle nous sommes même à même d’avoir ces élections aujourd’hui et la cause pour laquelle plus d’un miller de martyrs ont donné leur vie : «le pain, la liberté et la justice sociale. « 
 
Si ces élections se déroulent et sont internationalement reconnues, le régime aura reçu l’approbation du monde d’annuler tout ce que la révolution avait enclenché. Si nous restons silencieux  pendant ces élections, nous croyons que le régime à venir aura alors toute licence à nous traquer, nous enfermer et nous torturer dans une tentative pour réprimer toutes les formes de résistance à sa raison d’être.
 
Nous continuons sur notre voie révolutionnaire, engagés à résister à la domination militaire et à mettre fin aux tribunaux militaires pour les civils et la libération de tous les détenus dans les prisons militaires. Nous continuons à lutter sur notre lieu de travail, dans les écoles et les universités et avec les comités populaires dans nos quartiers.
 
Notre combat est aussi bien dirigé contre les gouvernements que contre les systèmes de soutien au régime qui nous opprime. Nous sommes déterminés à vérifier les accords financiers qui courent et qui continuent de se réaliser entre les institutions financières internationales ou des gouvernements étrangers, avec un régime qui prétend nous représenter tout en prospérant par l’exploitation et l’opression.
 
Nous vous appelons à nous rejoindre dans notre lutte contre les renforts de la contre-révolution. Comment allez-vous être solidaires? Si nous sommes combattus, vous êtes également l’objet d’attaques, notre combat est un problème mondial contre les forces qui cherchent notre obéissance en nous réprimant.
Nous sommes dans une vaste révolution en cours, une révolution qui ne sera réalisé que par la force, la communauté et la persistance du peuple, non pas par le biais d’un référendum toxique pour le régime militaire.
 
Originally published by the Monthly Review.
Traduit par Albane M.